Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/135

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à tout le monde durant de longues années. Enfin, il composa en latin un livre des hauts faits de Langey, qu’un autre familier de ce seigneur, Claude Massuau, traduisit en français sous ce titre : « Stratagèmes, c’est-à-dire prouesses et ruses de guerre du preux et très célèbre chevalier Langey au commencement de la tierce guerre césarienne. Lyon. Séb. Gryphe 1542. » Le texte latin et la traduction française sont également perdus.

Environ ce temps, l’amitié d’Étienne Dolet et de François Rabelais se rompit violemment et les torts les plus graves ne furent, peut-être, pas du côté d’Étienne. Ce libraire, très suspect d’hérésie, ayant réimprimé le Pantagruel avec tous les passages de nature à irriter les sorbonagres, de plus en plus violents et cruels, Rabelais prit peur ; et ce ne fut pas sans raison. Le danger était réel et l’on peut justement reprocher à ce farouche Dolet, si imprudent pour lui-même, d’avoir été aussi imprudent pour autrui ; on peut l’accuser de s’être plu à compromettre, à découvrir, à exposer un ami. Et il n’est pas surprenant que Rabelais se soit empressé de désavouer un aussi dangereux éditeur. Rabelais était prudent, il craignait le feu : « Je suis, de ma nature, disait-il, assez altéré sans me chauffer davantage. » Qui donc lui en ferait un grief ? Comme il publiait au même moment une édition expurgée, il y mit une lettre où il faisait parler son imprimeur, mais dont le style le trahit, et il dit expressément que Dolet a « par