Gallion, répliqua Langelier, de mener avec saint Paul une conversation soutenue sur quelque grand sujet de morale ou de philosophie. Je sais bien, et vous n’ignorez pas sans doute que, vers le Ve siècle de l’ère chrétienne, on croyait que Sénèque avait connu saint Paul à Rome et admiré la doctrine de l’apôtre. Cette fable put se répandre dans le triste obscurcissement de l’esprit humain qui suivit de si près l’âge de Tacite et de Trajan. Pour l’accréditer, des faussaires, comme il en pullulait parmi les chrétiens, fabriquèrent une correspondance dont saint Jérôme et saint Augustin parlent avec considération. Si ces lettres sont celles qui nous sont parvenues sous les noms de Paul et de Sénèque, il faut que ces Pères ne les aient pas lues ou qu’ils eussent peu de discernement. C’est l’ouvre inepte d’un chrétien qui ignorait tout de l’époque de Néron et était bien incapable d’imiter le style de Sénèque. Est-il besoin de dire que les
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