Page:Anatole France - Thaïs.djvu/215

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buvaient l’eau fraîche dans le creux de leur main et s’entretenaient de choses éternelles. Elle disait :

— Je n’ai jamais bu d’une eau si pure ni respiré un air si léger, et je sens que Dieu flotte dans les souffles qui passent.

Paphnuce répondait :

— Vois, c’est le soir, ô ma sœur. Les ombres bleues de la nuit couvrent les collines. Mais bientôt tu verras briller dans l’aurore les tabernacles de vie ; bientôt tu verras s’allumer les roses de l’éternel matin.

Ils marchèrent toute la nuit, et tandis que le croissant de la lune effleurait la cime argentée des flots, ils chantaient des psaumes et des cantiques. Quand le soleil se leva, le désert s’étendait devant eux comme une immense peau de lion sur la terre libyque. À la lisière du sable, des cellules blanches s’élevaient près des palmiers dans l’aurore.

— Mon père, demanda Thaïs, sont-ce là les tabernacles de vie ?

— Tu l’as dit, ma fille et ma sœur. C’est la maison du salut où je t’enfermerai de mes mains.