Page:Anatole France - Thaïs.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tèmes construits par les sages ne sont que des contes imaginés pour amuser l’éternelle enfance des hommes. Il faut s’en divertir comme des contes de l’Âne, du Cuvier, de la Matrone d’Éphèse ou de toute autre fable milésienne.

Et, prenant son hôte par le bras, il l’entraîna dans une salle où des milliers de papyrus étaient roulés dans des corbeilles.

— Voici ma bibliothèque, dit-il ; elle contient une faible partie des systèmes que les philosophes ont construits pour expliquer le monde. Le Sérapéum lui-même, dans sa richesse, ne les renferme pas tous. Hélas ! ce ne sont que des rêves de malades.

Il força son hôte à prendre place dans une chaise d’ivoire et s’assit lui-même. Paphnuce promena sur les livres de la bibliothèque un regard sombre et dit :

— Il faut les brûler tous.

— Ô doux hôte, ce serait dommage ! répondit Nicias. Car les rêves des malades sont parfois amusants. D’ailleurs, s’il fallait détruire tous les rêves et toutes les visions des hommes, la terre perdrait ses formes et ses couleurs et nous