Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 1, Hachette, 1890.djvu/494

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La propriété collective en usage chez les paysans, qui pour nous semble le trait le plus saillant de la Russie, a été l’une des dernières choses que l’Europe occidentale y ait aperçues, l’une des dernières que les Russes eux-mêmes aient remarquées dans leur patrie. C’est un gentilhomme westphalien, le baron de Haxthausen, qui en a fait la découverte, dans son voyage de 1842-1843 ; c’est lui au moins qui, le premier, l’a révélée à l’Europe dans ses célèbres études sur l’état intérieur de la Russie[1]. L’Europe savante fut justement frappée de rencontrer, dans l’empire autocratique du Nord, une institution qui semblait en partie réaliser les rêves des utopistes de l’Occident. Les Russes, appelés soudainement à la connaissance ou à la conscience de cette singularité nationale, s’en emparèrent avec joie. Naturellement portés à mettre partout en avant l’originalité des Slaves, comme les Allemands celle des Germains et nous-mêmes parfois celle des Celtes, de nombreux écrivains russes firent honneur de ces communautés agraires à l’esprit russe, au génie slave. Slavophiles, respectueux du passé et de la tradition moscovite, démocrates disciples de l’Occident, exaltèrent à l’envi la commune du Grand-Russe. On y voulut voir l’institution primordiale de la nation et, en même temps, la formule d’une nouvelle civilisation, le principe futur de la prochaine régénération de l’Europe, en proie aux luttes de classes et

    nombreux écrits russes publiés sur la matière, spécialement sur la grande enquête agricole de 1873, dont les résultats ont été rassemblés par le gouvernement sous le titre de Troudy vysotch. outchregd, kommissi dlia isslédovaniia nynechniago pologéniia selskago khoziàïsiva. Ces documents ont été complétés par les réponses faites aux questionnaires de diverses sociétés savantes, telles que le Sbornik matérialof dlia isoutchéniia selskoï posemelnoï obchlchiny, et par diverses publications du comité central de statistique, du ministère des domaines ou des États provinciaux (Zenutvos), telles que les Malerialy dila isoutchéniia sovremennago semlevladéniia i selsko-khoziaïslvennoï promychlennosti v Rossii (St.-Pet, 1880), et la Statistika pozemelnoï sobstvennosti i naselennykh mêst Evrop. Rossii (1880-81).

  1. Studien uber die innern Zustände, das Volksleben und inbesondere die ländlichen Einrichtungen Russlands (éd. all. 1847, t. I, ch. vi : t. II ch. xvii).