Aller au contenu

Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des villes, propriétaires individuels, paysans des communes, les trois catégories d’habitants représentés aux États provinciaux ont souvent ainsi reculé devant la crainte d’augmenter démesurément leurs contributions. De tels soucis refrènent la passion des réformes et bornent les projets d’amélioration. Dans les zemstvos des provinces les moins favorisées, l’indifférence et l’inertie sont ainsi nées de l’accablement et de l’impuissance.

Le découragement n’a toutefois pas été général. Les provinces les plus riches ou les moins affaissées sous le joug de l’impôt ont, à force de courage, su se créer des ressources. Les revenus de la plupart des zemstvos n’ont cessé de croître d’une manière rapide. Vers 1865, au début de l’institution, les recettes réunies des vingt-neuf ou trente gouvernements alors en possession d’assemblées territoriales atteignaient à peine 5 millions de roubles ; en 1868 elles montaient déjà à 14 millions 1/2, ayant presque triplé en trois ans. En 1872 le total de ces budgets provinciaux s’élevait, pour trente-deux gouvernements, à 19 millions de roubles ; en 1874 il approchait de 23 millions ; en 1876 et 1877 il dépassait 26 millions et demi. Dès 1885, malgré la guerre de Bulgarie, qui les a tous endettés, le revenu des zemstvos était porté à une quarantaine de millions de roubles. Pour presque tous, il est vrai, les dépenses sont restées supérieures aux recettes[1].

Parmi les zemstvos, l’un des plus riches était, dans ces dernières années, celui de Perm, dont le budget annuel dépassait 2 millions de roubles 1/2 ; le plus pauvre était celui d’Olonets, dont les recettes descendaient au-dessous de 600 000 roubles. Moscou n’est venu longtemps qu’au cinquième ou sixième rang, et Pétersbourg demeure fort en arrière, au nombre des douze ou quinze moins favo-

  1. La propriété rurale fournit seule aux zemstvos les trois quarts de leurs revenus. Outre les taxes levées à leur profit, certains zemstvos possèdent quelques ressources accessoires, intérêts de fonds placés, fermages de terres ou locations d’immeubles.