Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/174

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doublement intéressé à l’accomplissement des prescriptions religieuses, dont il est responsable devant son évêque, et qui sont le gagne-pain de sa famille, ne peut les laisser oublier à ses ouailles. Comme il arrive chaque fois que l’Église exige le certificat d’un acte de piété, chez nous, par exemple, pour la confession avant le mariage religieux, les mœurs amènent souvent le clergé à dispenser lui-même l’indifférent ou le sceptique de la pratique d’une règle qui leur répugne. Au moyen d’une offrande, on peut se faire inscrire sur les listes du pope, sans se soumettre aux actes religieux dont elles enregistrent l’accomplissement. Le fait n’est point rare parmi les membres des sectes populaires.

Le croyant et l’hypocrite payent ainsi pour recevoir les sacrements, l’incrédule et le sectaire pour en être dispensés. Dans un cas comme dans l’autre, le prêtre touche de son paroissien la redevance que lui attribue l’usage. La vie religieuse, l’esprit même de la piété, ne peuvent échapper entièrement à l’influence de pareilles coutumes. L’habitude de voir approcher de l’autel des âmes tièdes ou indifférentes rend le prêtre lui-même moins difficile sur les conditions spirituelles de la participation aux sacrements. Il est plus porté à se contenter des dehors et de la soumission matérielle aux rites ; par là, les dévotions de commande diminuent indirectement la valeur des autres. Des raisons analogues avaient amené des mœurs à peu près semblables dans tout l’ancien empire Ottoman, où, sous la domination turque, le clergé grec conservait un rôle politique. C’est ainsi que des causes extérieures ont entretenu, chez la plupart des peuples orthodoxes, le formalisme religieux, auquel les inclinait déjà leur tempérament ou leur état de civilisation.

Le plus grand acle de la vie chrétienne, la communion, suggère dans l’Église gréco-russe les mêmes remarques que la confession. La masse du peuple, qui remplit si scrupuleusement les prescriplions religieuses, ne s’approche du sacrement eucharistique qu’une fois l’an, pendant le grand