Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/250

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou métropolites s’étaient en vain efforcés de le répandre. La plupart des couvents étaient une réunion d’hommes vivant sous le même toit, sans pour cela vivre en commun. On priait ensemble, d’ordinaire on mangeait ensemble, mais chacun avait son pécule, sa part des revenus de la maison, et en disposait à son gré. Le Saint-Synode a l’intention d’introduire dans tous les monastères le régime de la communauté avec une discipline plus sévère. C’est l’autorité ecclésiastique centrale, et, par suite, le gouvernement, que regarde la réforme monastique. Les couvents, en Russie, ne sont point des établissements particuliers : c’est une institution nationale, une sorte de service public. Dans un gouvernement autocratique, de pareilles associations ne peuvent vivre qu’à la condition d’accepter la tutelle gouvernementale.

Comme l’Église, la vie monastique a été soumise, par le pouvoir, à la réglementation bureaucratique. Loin d’être, comme en Occident, de libres corporations plus ou moins indépendantes, les couvents russes ont longtemps perdu le droit de nommer leurs supérieurs. Ils sont placés sous l’absolue domination du Saint-Synode ; sans l’autorisation synodale, on ne peut fonder un couvent ; sans elle, on ne peut admettre un novice à prononcer ses vœux. Jusqu’à une réforme récente, c’était le synode qui nommait à toutes les dignités monastiques. Les postes d’hégoumènes et d’archimandrites, c’est-à-dire d’abbés ou de prieurs, étaient devenus comme des grades de la carrière ecclésiastique. Les monastères étaient souvent donnés à des évêques ou à des aspirants à l’épiscopat ; de là un ordre de choses qui n’était pas sans analogie avec les bénéfices et les commendes de l’ancienne France. Les archimandrites ou supérieurs des couvents de première classe étaient des prélats jouissant de gros revenus, ayant des équipages, vivant peu de la vie de leurs moines, alors même qu’ils habitaient au milieu d’eux.

Le Saint-Synode s’est préoccupé de corriger ces abus. En