Les sectes naissent des sectes, il en est d’elles comme des herbes de la steppe ; elles se ressèment spontanément. Il en surgit sans cesse de nouvelles : on en signale presque chaque année. On s’étonno de la persistance de cet esprit de sectes, dix générations après Pierre le Grand et trente ans après l’affranchissement des serfs. Ni les réformes de Pierre Ier, ni celles d’Alexandre II n’ont encore modifié l’état mental du peuple. Près de deux siècles ne lui ont pas suffi pour se faire entièrement aux procédés de l’État moderne. Le servage est supprimé, mais les rêves du moujik ont survécu à l’émancipation. Ce que n’ont pu lui donner les ministres du tsar, il persiste à l’attendre des envoyés de Dieu. Puis, outre ses vagues aspirations sociales que son imagination enfantine enveloppe de formes religieuses, ce peuple illettré a ses besoins spirituels que l’Église n’a encore pu satisfaire ; ce qu’il ne trouve point près de son clergé, il va le chercher près des prophètes de villages.
Dans les sectes nouvelles, comme dans les anciennes, l’imposture et le fanatisme se côtoient et s’associent. Par-