Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/109

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sait Balzac, il reprenait sérieusement, et, s’excitant par ses propres paroles, il arriva à des détails tels, qu’il prétendit avoir été obligé de mettre sa montre en gage pour avoir de quoi dîner.

Il exagérait certainement sa détresse, car, s’il n’avait pas tout l’argent nécessaire pour acquitter d’anciennes dettes contractées dans une affaire d’imprimerie, il est bien vrai qu’à l’époque où il parlait ainsi Balzac n’avait qu’à écrire quelques pages dans un journal ou dans une revue pour trouver plus que sa montre engagée ne pouvait lui rapporter. Mais il était sous une fâcheuse impression, et de plus il s’exaltait à l’effet produit par ses paroles et qui était tel, que le visage de l’Américain en était positivement décomposé et rouge, comme si la honte lui eût monté au front. Était-ce pour le pays qui laissait le talent misérable ? était-ce pour l’écrivain qui osait si ouvertement afficher sa misère ?

Ce qu’il y a de certain, c’est que j’en fus moi-même toute déconcertée et que ma surprise s’augmenta lorsque, le soir de ce même jour, j’arrivai chez la duchesse d’Abrantès au moment où Balzac énumérait les sommes prodigieuses dont il devait,