Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/112

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hors de toute inquiétude et assuré à jamais une fortune à Balzac. M. d’Aligre entassait chaque jour des sommes inutiles, et sa main serrait avec affection des mains qui se fatiguaient à un travail incessant, sans pouvoir, grâce à leur imprévoyance, il est vrai, se procurer ce qui était nécessaire pour tranquilliser leur esprit, cet esprit qui devait, malgré cela, créer des récits attrayants pour amuser l’esprit des autres. Voilà la société parisienne !

On sait quelle singulière réputation de parcimonie s’attachait à ce beau nom de la magistrature. Son père avait été premier président au parlement de Paris, et comptait déjà parmi les hommes les plus riches et les plus économes de France. On raconte qu’ayant constamment agi avec cette même prudence conservatrice il se trouvait, lors de l’émigration, être presque le seul qui eût de grosses sommes au milieu de compatriotes mourants de faim ; mais il n’en gardait que plus soigneusement un trésor dont le dénûment des autres lui faisait mieux sentir le prix. Un de ses amis, le comte de L., réduit hors de son pays à la plus dure extrémité, se décida un jour à venir lui demander avec instance une petite somme