Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je crois que je ne l’aurais pas cherchée sans cela, malgré son invitation. Peut-être sa réputation de beauté m’eût-elle amenée chez elle aux jours de son éclat, tant le beau, sous toutes ses formes, a d’attrait pour moi ! Mais ce temps était passé, et rien ne m’a été plus pénible et ne m’a donné une idée plus douloureuse de la triste fragilité des choses de ce monde que le visage flétri et déformé d’une femme qui fut belle : cela serre le cœur et fait mal, tandis que la beauté immortelle de la pensée vous ranime et vous exalte l’âme, à la vue d’une personne dont les œuvres supérieures garderont leur éternelle jeunesse !

Aussi mon cœur battait-il bien fort le jour où je montai pour la première fois l’escalier de madame Récamier, à l’Abbaye-aux-Bois, où je savais que j’allais trouver Chateaubriand.

Le salon où je fus introduite, et où se tenait toujours madame Récamier quand elle recevait, était une grande pièce au premier étage, précédée de deux petites. Le jour y était tellement ménagé et de doubles rideaux clairs et épais faisaient une telle résistance à l’invasion des rayons lumineux, qu’il était impossible de rien distinguer en entrant. J’ai