aussi entendait-on souvent chez elle d’excellents artistes. De ce nombre était madame Grassini, belle encore, bonne toujours, ayant conservé cette admirable voix de contralto qui l’avait rendue célèbre. Madame Grassini mériterait bien à elle seule une petite notice ; reçue partout, aimée de tous, ayant un naturel bienveillant, spontané, vrai et original, parlant une espèce de jargon mêlé d’italien et de français, qui n’était qu’à elle, qui lui permettait de tout dire, et dont elle profitait pour faire les plus drôles de remarques et les plus drôles de confidences, rejetant la faute de ses paroles sur son ignorance de la langue, quand cela pouvait choquer ou blesser quelqu’un.
Les réunions de madame Lebrun avaient lieu le samedi soir, et l’on peut dire que ce salon présentait quelque chose de particulier qui ne se trouvait dans aucun autre. Là, les débris de l’ancienne cour étaient réunis après trente années, et Dieu sait ce qu’il peut rester d’une société après trente années pareilles de troubles, d’exil, de dangers et de malheurs ! Ces exilés se retrouvaient et pouvaient encore parler des jours heureux qui avaient précédé tant d’infortunes et les avaient