Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je partis pendant qu’on goûtait, et je pris pour revenir chez moi une voiture de place qui stationnait devant la porte et qui s’offrit à me conduire ; sur la banquette de devant était un papier déployé et un peu chiffonné ; j’avoue que les morceaux de papier qui n’appartiennent à personne et qui me tombent ainsi sous la main excitent ma curiosité, et ils m’ont quelquefois fourni le sujet de piquantes observations. Mais que celles-ci furent tristes, et qu’elles me navrèrent ! Je lus d’abord machinalement : c’étaient des reproches durs et cruels, presque des injures adressées par un créancier à un débiteur insolvable ou de mauvais vouloir ; et je ne puis exprimer ce que j’éprouvais de douloureux en reconnaissant que tout cela s’adressait à la duchesse d’Abrantès, à cette femme déjà âgée que je venais de laisser badinant comme une enfant. Mon étonnement était extrême. Ces habitudes-là m’étaient complétement inconnues. J’avais bien vu des gens pauvres ne pouvant s’acquitter, mais le malheur les retenait tristement à leur foyer, des larmes obscurcissaient leurs yeux, et le sourire ne venait plus sur leurs lèvres pâlies. Pour la première fois, cette vie de joie et de dou-