Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/48

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cesse. Il écoutait les champs mornes et désolés, où des monticules de fumier gelé ressemblaient à une série de petites tombes couvertes de neige ; il écoutait le lointain bleuâtre et limpide, les poteaux télégraphiques sonores. Lui seul savait ce que disent les champs et les poteaux du télégraphe. Il écoutait aussi les conversations des hommes, les récits de meurtres, de pillages, d’incendies.

Une fois, pendant la nuit, au hameau, la petite cloche du temple tinta, faible et lamentable ; des flammes s’élevaient. Des malfaiteurs, venus on ne sait d’où, pillaient la ferme voisine. Ils tuèrent le maître et sa femme et mirent le feu à la maison. L’inquiétude naquit dans la ferme où vivait Ianson : jour et nuit, les chiens étaient lâchés ; le maître laissait un fusil à portée de son lit. Il voulut aussi donner une arme à Ianson, mais celui-ci, après avoir examiné le fusil, hocha la tête et refusa de le prendre. Le maître ne comprit pas que Ianson avait plus de confiance en l’efficacité de son cou-