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Page:Andre Cresson - La Philosophie francaise.djvu/107

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DE LA RÉVOLUTION À NOS JOURS
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à Kant qu’un Renouvier, un J. Lachelier, un Hamelin se réfèrent.

Le propre de la doctrine scientiste est de réduire l’Univers à cette poussière de molécules, d’atomes et d’électrons en mouvement dont nous avons évoqué l’image. Mais une telle poussière de corpuscules distincts les uns des autres serait impossible sans un espace où ils soient juxtaposés. D’autre part, comment leur mouvement se produirait-il sans un lieu pour se déployer et un temps permettant son développement ? La métaphysique scientiste postule donc la réalité de l’espace et du temps ; sans elle rien ne pourrait être de ce qui, dans cette doctrine, explique tout.

Cela posé, qu’on lise Kant et Schopenhauer. Ils sont d’accord : l’espace et le temps n’ont aucune réalité métaphysique. Ce sont seulement des « formes de la sensibilité » humaine, des façons de voir que nous avons, des perspectives qui ne s’imposent à nous que parce que nous sommes nous. Dès lors, comment les corpuscules en mouvement qu’on nous invite à admettre pourraient-ils avoir la réalité que les scientistes leur attribuent ? Il est peut-être utile pour nos calculs de nous figurer les choses ainsi. Faut-il en conclure qu’elles soient comme il nous est commode de nous les représenter ?

Et l’on incrimine les scientistes d’avoir confondu des schémas recommandables avec des réalités effectives. Schopenhauer accuse les matérialistes de mettre « la charrue avant les bœufs ». On ne saurait expliquer l’esprit par les corps, car ce sont les corps qui sont une production de l’esprit. Ils ne sont, en effet, que des représentations issues de notre conscience. Cela compris, on est, selon les idéalistes, à l’abri des élucubrations scientistes.

Et voici, aiguisées par des criticistes éminents