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Page:Andre Cresson - La Philosophie francaise.djvu/11

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INTRODUCTION
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de connaissances n’est ce qu’il doit être que si les principes y figurent comme principes, les conséquences comme conséquences, et si les parties qui ne dépendent pas logiquement les unes des autres sont du moins rangées dans un ordre tel qu’il soit toujours aisé de s’y référer quand on en a besoin. Cela aussi les philosophes français l’ont presque tous compris.

Penser clairement, prouver fortement leurs thèses, les exposer nettement et en ordre avec la nuance de certitude qu’elles comportent, voilà les préoccupations dominantes chez la plupart des philosophes français. Et assurément cela n’a pas suffi à les mettre tous d’accord. Comment s’en étonner ? Rappelons-nous ce que dit Pascal : les choses « paraissent vraies ou fausses suivant la face selon laquelle on les regarde. Or ce qui attire nos regards sur une face plutôt que sur l’autre, c’est ce qui nous frappe en raison de notre tournure d’esprit et de notre caractère, produits originaux et uniques des hérédités mélangées dont nous sommes formés et des multiples influences physiques et morales que nous avons subies. Penser avec le triple souci de la clarté, de la preuve et de l’ordre, c’est bien la condition nécessaire pour faire naître l’accord des esprits et des âmes. Mais une condition nécessaire n’est pas pour autant une condition suffisante. Les volontés ont beau être bonnes, les intentions sincères, l’unanimité n’est pas aisément acquise dans les questions controversables, surtout lorsque, en raison de leurs retentissements religieux, moraux et politiques, elles sont de nature à passionner les esprits. L’évolution de la pensée française va nous le montrer une fois de plus. Nous y distinguerons deux périodes.