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voyage du condottière

Une pureté éclatante, c’est le trait dominant de cette figure. Elle n’est même pas froide : elle a le coupant des cimes neigeuses ; et, comme la glace, elle illumine. Enfin, ce corps magnifique de guerrier est une épée, qui porte à la garde une tête sublime.

Elle est ceinte du laurier. Et tel est le goût de l’ornement, que la couronne semble un rinceau naturel de la coiffure, comme les cheveux, taillés droit sur le front et pendants sur les côtés, sont la parure naturelle de la tête. La chevelure entoure le crâne comme un casque, le heaume ouvert.

Il ne dort pas. Il rêve, il médite ; il tient le mot de la victoire. La plus violente énergie ne lui coûte pas : elle est en lui comme l’odeur ou la blancheur du lys est au lys odorant et candide.

La divine vertu de ne rien craindre, voilà ce que ce corps exprime. Et, selon la loi, celui que n’atteint pas la crainte, est celui que n’a jamais visité ni le péché ni le crime. Le courage sans fard et sans limite est la face de la pureté parfaite, tournée vers l’action. Si Gaston de Foix eut cette innocence légendaire, qui le sait ? Son image funèbre ferait croire à une perte, que rien n’a pu compenser.

Le corps du héros est immense. Gaston de Foix était un géant, long, élégant, maigre du bas, large du torse, la taille mince et les épaules vastes. Cette statue se dédie elle-même à tous les princes de la guerre.

La chasteté virile comporte une pureté où la plus vierge des jeunes filles n’atteint jamais. La vierge échappe à son destin tandis que le pur héros le fait.

L’artiste a couché le corps sur un brancard de pierre, drapé de linge virginal. Il lui a croisé les mains sur la grande épée brisée par le milieu ; et la ceinture fait les quillons à la fusée. Les