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Page:Andre Suares Voyage du Condottiere Vers Venise, 1910.djvu/85

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XIII

LA DÉROUTE DE PAVIE



On sort de Milan par une triste route. Sous un ciel pesant, le chien du sud aboie, le vent souffle, et la matinée est déjà chaude. Les faubourgs accroupis sont couchés les uns contre les autres, comme une bande de porcs, laids, teigneux, rogneux et sordides : sous la crasse, toujours perce un coin de muraille rose. Des fumées lourdes restent à mi-chemin dans l’air gris. Un peuple criard, une canaille lasse se meut sous la poussière, comme de gros vers noirs dans la farine du pays. Et la sale marmaille est une poussière aussi : beaucoup d’enfants, hâves et mal nourris, lèvent un museau pointu sous des cheveux frisés.

Ce pays est plein d’ennui. On ne voit rien, de longtemps. Tout est plat, mais ce n’est pas la vaste plaine. La vue est partout coupée par de petits bois, en forme de haies basses. La maigreur de ces bosquets poudreux ne promet pas beaucoup d’ombre à la canicule. Il y a de l’eau pourtant, dans les bas-fonds. La rizière verdoie, et les mûriers ronds tiennent tête au vent sur leur base trapue.

Cependant, la contrée se découvre. Elle est aride, ou le paraît ;