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QUATRIÈME JOUR

revenir au principal sujet de nos commentaires. Arrêtons-nous à la nomenclature des objets figurant sur l’Autel de la Reine. Nous y voyons un Livre noir et or, une lumière éternelle portée par un flambeau d’ivoire, une sphère céleste, une horloge, une fontaine de cristal laissant s’épancher une eau rouge, et une tête de mort servant d’abri à un serpent blanc. Nous retrouverons dans la suite ces six objets utilisés suivant leur nature et leur rôle, mais que conclure d’un assemblage aussi disparate ? Il y aurait évidemment de nombreuses pages à écrire, mais nous devons nous borner à en condenser le symbolisme en quelques lignes. Sans doute certains lecteurs jugeront que nous donnons ici à la Vérité une légère entorse, d’autres jugeront avec nous que celle-ci est nécessaire.

Le Livre est celui de la Connaissance, et le flambeau brille de la flamme éternelle de la tradition secrète qui depuis l’origine s’est transmise à travers les siècles sans jamais s’éteindre. La Sphère céleste permet de juger les aspects favorables des astres pour travailler au Grand Œuvre ; l’Horloge sonne l’heure où les temps sont révolus. La fontaine de cristal est celle où se baigne le Roi quant à la tête de mort, elle traduit littéralement le Caput Mortuum des Alchimistes au sens mystique. Le grand serpent blanc qui n’en sort jamais complètement, évoque le cycle éternel des choses. La Mort absolue n’existe pas ; il n’y a que des périodes de repos, de transformations et de renaissance. Rien ne peut renaître à un état meilleur sans mourir préalablement et subir la période de dissolution et de putréfaction de ses principes antérieurs. Cette période qui dans le Magistère dure 40 jours philosophiques a donné naissance à de nombreux mythes et superstitions, depuis les quarante jours du Déluge jusqu’à la quarantaine que subisse encore certains navires entrant au Port (sans oublier la retraite des quarante jours que Jésus fit dans le désert).

L’arcane XIII du Tarot est puissamment évocateur à ce point de vue ; nous y voyons sortir de terre les têtes du Roi et de la Reine, dont la perfection ne peut exister sans être précédée de destruction. La faulx que tient le squelette est celle dont Saturne mutila son Père Uranus, et dont il fut à son tour mutilé par son fils Jupiter des parties mutilées et de la mer, naquit Vénus. Je préviens charitablement le lecteur qui serait tenté de pratiquer, se fiant au symbolisme des sept planètes qu’il perdrait son temps et son charbon en chauffant dans un creuset du plomb, de l’étain et du cuivre. Qu’il laisse aux métallurgistes le soin de préparer les alliages industriels et qu’il ne confonde pas l’alchimie avec l’art de Vulcain !

Parlons encore un peu du serpent ; il figurait les quatre éléments chez les Égyptiens, aussi fut-il considéré par les Philosophes, tantôt comme symbole de la matière du Magistère qui est un abrégé des