Page:Andreae - Les Noces chymiques, 1928, trad. Auriger.djvu/57

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COMMENTAIRE


Rendant hommage au Créateur en chantant ses louanges, notre héros traverse une forêt, puis une plaine. Fatigué d’une longue marche, il veut se reposer à l’ombre de trois beaux cèdres, mais un écriteau apposé sur l’un d’eux l’avertit que quatre chemins conduisent aux Noces du Roi, à l’expresse condition, toutefois, de ne pas s’écarter de celui que l’on a choisi. La première voie est courte mais périlleuse et pleine d’écueils difficiles à éviter ; l’autre qui les contourne est plane, et facile, à condition de suivre sa boussole et de ne se laisser entraîner ni à droite, ni à gauche. La voie royale est la troisième ; elle est rendue joyeuse par les divers agréments et spectacles qu’offre le Roi sur son cours, mais à peine un sur mille peut atteindre le but. Il ne saurait être question pour un homme de suivre la quatrième pour parvenir au Roi, car elle brûle, et ne convient qu’aux corps incorruptibles. Une fois en route, la voie doit être suivie jusqu’au bout et nul ne peut revenir en arrière…

Alors que Christian Rosencreutz hésite sur la route à suivre, celle-ci se trouve déterminée par la rencontre fortuite d’un corbeau avec la colombe à laquelle il jetait les miettes de son pain. Nous retrouverons plus loin cet antagonisme du blanc et du noir et nous en donnerons alors l’explication. Les deux oiseaux se poursuivant s’envolent vers le midi, direction dans laquelle les suit notre héros : « Que celui qui veut devenir savant voyage vers le Midi, que celui qui veut devenir riche voyage vers le Septentrion » (Babha Bathra, Fol. 5, Col. 2). Le mythe de la blanche colombe se retrouve en maints auteurs et on ne peut s’empêcher de songer à un passage de L’Arcanum Hermeticae Philosophiae Opus où D’Espagnet employant la même allégorie dit que l’entrée du Jardin des Hespérides est gardée par des bêtes féroces qu’on ne peut adoucir qu’avec les attributs de Diane et les colombes de Vénus. Philalèthe, dans son traité : Introitus apertus ad occlusum Regis palatium, fait de fréquentes allusions à ces colombes, et ce sont encore ces gracieux oiseaux, que le doux Virgile nous décrit volants vers Énée, puis vers l’arbre double où il cueillera le rameau d’or qui doit lui permettre l’accès des Enfers