Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/150

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Le Guerrier.

Tel est le prix auquel ma victoire est gagnée !
Et j’espère pourtant que toute ma lignée,
Mes fils et mes petits-enfants et leurs enfants,
Les uns vaincus sans doute, et d’autres triomphants,
Voudront avec honneur hériter de mes armes,
Et qu’ils les porteront quand viendront les alarmes,
Les dangers qui naîtront de ceux dont j’ai gardé
Le sol natal. Que ceux qui m’auront succédé,
Condamnés à l’effort ainsi que nous le sommes,
Destinés aux combats parce qu’ils sont nés hommes,
Sachent vivre, combattre et mourir bravement !


La vie est trop immense, hélas ! pour qu’en fermant
Le pauvre cercle étroit de la pensée humaine
Sur son mystère étrange et noir, on la contienne !
Nos jugements chétifs en elle errent perdus,
Ainsi que ces filets dans l’océan tendus
Par des pêcheurs penchés au bord de leur chaloupe ;
Chacun de nos desseins à sa taille découpe
Un infime morceau de l’univers sans bords ;
Nous n’y marquons pas, même avec nos désaccords.