Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour dresser cette immense et savante machine
Où, par un lent travail secret, s’emmagasine,
S’exerce, s’assouplit, s’organise, se tend
La force d’un pays, afin qu’en un instant
Elle se lâche et frappe un coup inéluctable,
Ou soit, en même temps et s’il le faut, capable
D’user, dans des revers sans cesse réparés,
Des ennemis par leurs victoires dévorés,
Épuisant la défaite à force de défense,
Sais-tu bien ce qu’il faut d’efforts, de vigilance,
D’exercices sans fin, d’énergie et de temps ?
Pense au long cri rythmé des haleurs haletants
Pour tirer en cadence et haler un navire,
Et vois l’accord qu’il faut pour garder un empire !
Pour l’avoir oublié, des races ont péri !


Mais quand un peuple, autour de lui, sent cet abri,
Alors le laboureur peut labourer tranquille,
Le maçon élever ses arceaux dans la ville,
Le poète chanter, le philosophe aussi
Parler aux jeunes gens de l’éternel souci
Que leur obscur destin cause aux âmes humaines,
Et les filles remplir leurs cruches aux fontaines,