Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il écrivit, en l'honneur de sa dame, Le Carnet dû Roi, un joli poème amoureux, où il raconte comment naquit sa passion, et qui, pour le luxe des descriptions, la révérence envers la femme, un sentiment de fraîcheur printanière, et je ne sais quelle jeunesse et clarté des mots, n'est pas loin de Chaucer .^

Cependant le duc d'Albany, qui avait été nommé régent à la mort de Robert III, était mort lui-même. L'Ecosse était sans gouvernement. Henri V consentit à relâcher son prisonnier. Avant son départ, Jacques épousa la jeune fille dont la vision avait consolé son exil. Il rentra dans son royaume en 1423, et fut couronné solennellement dans l'église de l'Abbaye de Scone^. Ce jeune homme, qui avait commencé la vie en artiste, se trouva être un grand roi ; ce rêveur avait une énergie rapide et inflexible. Il trouva le pays dans le chaos, les nobles indépendants, le peuple en désarroi, le brigandage et l'anarchie partout. «Si Dieu me prête vie, dit-il en entrant sur son sol, il n'y aura pas un endroit dans mon royaume, oii l'a clef ne gardera pas le château, et la touffe de genêt la vache, quand je devrais mener la vie d'un chien pour l'accomplir ^ ». La répression fut terrible : la famille d'Albany fut détruite ; il défendit aux nobles de voyager avec une suite trop nombreuse ; confisqua les biens de ceux qui résistaient. Un jour il lit pendre trois cents brigands ; tout chef rebelle était exécuté sur le champ. Son activité était infatigable ; sa vigilance s'étendait à tout. Il promulgua des lois sur les pêcheries, sur les impôts, contre la simonie, sur les mendiants, des lois somptuaires. Il encouragea le commerce. On a de lui une loi qui ordonnait aux proprié- taires d'arbres de détruire les nids de corbeaux, à cause des dégâts que ces oiseaux causent aux blés. Tout arbre, sur lequel un nid de corbeaux était encore trouvé le deux du mois de mai, était abattu et confisqué ^. Pendant quinze ans, il travailla sans relâche à rendre à son peuple l'ordre et la paix. Il avait peut-être mené trop rudement les choses, avec des idées trop anglaises, sans tenir assez compte de l'état du pays. Les nobles résolurent de se délivrer de cette main de fer qui les écrasait. Une conspiration s'ourdit. Elle éclata dans une scène qui est une des plus épouvantables que contiennent les annales d'Ecosse, riches pourtant en tragédies de ce genre. Pendant que le roi était à Perth, les conjurés pénétrèrent la nuit dans le château. Les verroux de la chambre royale avaient été enlevés par une main traîtresse. Quand on entendit les pas des meurtriers, le roi était seul, sans armes, avec la reine et les dames de la suite. Une d'elles, Catherine Douglas, essaya héroïquement d'arrêter les assassins, en met-

1 Voir, sur le King's Quair, Irving, History of Scotish Poelry,^. 134-142.

2 Hill Burton. History of Scotland, tom II, p. 397. ^ Tytier. Jlistory of Scotland, tom II, p. 51.

^ Voir, sur les réformés de Jacques I, le chapitre abondant de Tyller, History of Scotland, tom II, chap. ii, p. 52-56.