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lorsque l'argile s'était tassée , cette partie solide n'avait pas cédé et avait fait bomber la paroi en dehors. Avec sa méchanceté à découvrir le moindre point faible des abris humains , le vent avait profité de ce défaut pour pousser le pignon du côté oîi il penchait. Le mur s'était effondré. Pendant la nuit, à travers la tourmente, il fallut transporter la mère et le nouveau-né chez un voisin, où ils attendirent que William Burnes eût réparé les dégâts et refermé la maisonnette ^. « Rien d'étonnant, disait plus tard Robert, que lorsqu'on est entré dans ce monde par une telle tempête, on soit la victime de passions tempétueuses ^ ».

Moins d'un an après Robert, naquit son frère Gilbert qui devait être son compagnon , son confident et plus tard presque son meilleur biographe. Puis vinrent en 1762 et en 1764- deux sœurs , Agnes et Arabella , en sorte que le petit cottage fut bientôt trop peuplé. Plus tard la famille devait s'augmenter encore d'un troisième fils, William, né en 1767 ; d'un quatrième, John, né en 1769 et qui mourut jeune, et de la dernière fille, Isabella, née en 1771, douze ans après son frère aîné et qui mourut en 1858 , amenant ainsi jusque dans notre génération un front sur lequel avaient joué les doigts de Robert Burns.

C'est dans les quelques milles compris entre la petite rivière de l'Ayr et le petit cours d'eau du Doon que s'écoulèrent les premières années de Robert Burns.

La route, qui passe maintenant devant le cottage, passait alors derrière, au bout du jardin, plus près de la mer, pittoresque et animée comme les routes d'alors par une population errante, très nombreuse en Ecosse. C'étaient les colporteurs, avec leur paquet sur l'épaule et leur aune en main ; des marchands de littérature populaire avec leurs livres à un penny et leurs ballades à un demi-penny ; les chaudronniers avec leur provision de cornes et leur moule à faire les cuillers courtes qu'on nomme ciMies ; des bandes de gipsies ; et parfois un sergent de recrutement ou un mendiaut du roi avec sa robe de drap bleu et sa plaque d'étain. C'est là, sans doute, dans les interminables contempla- tions enfantines, que Burns prit le sentiment desgrand'routesqui revient souvent chez lui et qu'il s'éprit de sympathie pour le peuple poudreux et déloqueté des vagabonds et des gueux. Les endroits qu'il habita en quittant le cottage de la route d'Ayr n'étaient pas aussi faits pour lui donner cette impression, qu'il dut surtout emporter d'ici. De devant le cottage, on voit, du côté du nord, les pignons débandés des dernières maisons d'Ayr, entre lesquels apparaissait jadis le Vieux Pont avec ses contreforts massifs ; au dessus des toits se dresse la Tour de Wallace. Du côté sud, on voit la bordure d'arbres sous lesquels coule le Doon et le

1 Letter of Gilbert Burns to D^ Currie.

2 Shairp. Robert Burns. Ghap. i.