Page:Angellier - Robert Burns, I, 1893.djvu/21

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vainqueur de Bannockburn se révolta et a d'abord « brandi sa lance * ». C'est peut-être à ces premières impressions que les Écossais doivent Y Ode de Bruce à ses soldats.

Son enfance de poète eût été incomplète si elle n'avait eu sa part de contes merveilleux. Il y avait, dans la pauvre chaumière, une vieille femme que William Burnes avait recueillie par chanté, et qui sous ses rides possédait une mémoire, une imagination de conteur ; un trésor d'histoires fantastiques sortait d'elle comme ces beaux livres qu'on trouve dans un meuble vermoulu et poussiéreux. Elle n'était jamais lasse de raconter, et Rurns lui a rendu justice. « J'ai dii beaucoup à une vieille femme qui restait dans la famille , remarquable par son ignorance, sa crédulité et sa superstition. Elle possédait, je suppose, la plus vaste collection dans le domaine des histoires et des chansons concernant diables, esprits, fées, lutins, sorcières, sorciers, feux-follets, lueurs d'elfes, lumières de trépassés, revenants, apparitions, charmes, géants, tours enchantées, dragons et autres fantasmagories. Cela cultiva en moi les germes cachés de poésie, mais eut un si puissant effet sur mon imagination que, même aujourd'hui, dans mes promenades nocturnes, je fais parfois attentiou dans les endroits qui ont mauvaise mine ; et bien que personne ne puisse être plus sceptique que moi en pareille matière, cependant il faut que je fasse un effort de philosophie pour secouer ces vaines terreurs ^. » C'est probablement à ces contes de vieille femme que sont dues les pièces fantastiques de Burns : la Mort et le Docteur Hornbook, V Adresse au Diable, toute la diablerie de Tarn de Shanter^ et surtout ce frisson d'épouvante qui y court.

Les huit premières années de la vie matrimoniale de William Burnes , les sept premières années de la vie de Robert Burns, se passèrent là et ainsi. Elles semblent avoir été les plus heureuses qu'ait connues la pauvre famille. Mais le nid était devenu trop étroit. Déjà trois enfants, un quatrième attendu. Pour rester dans la maisonnette, il fallait placer les aînés au dehors, les exposer si jeunes aux duretés, peut-être aux bruta- lités et, pire encore, peut-être aux mauvais exemples d'étrangers. Avec sa noblesse de vues, le père résolut de tout faire pour garder ses fils sous son regard et sous sa main, jusqu'à ce qu'ils fussent moralement formés. Robert Burns a marqué, très précisément, cette préoccupation de son père. « Si mon père était resté dans cette situation , il aurait fallu que je m'éloignasse et que je devinsse un des petits domestiques qui traînent dans une ferme. Mais c'était son souhait et sa prière les plus chers de pouvoir conserver ses enfants sous ses jeux, jusqu'à ce qu'ils pussent discerner entre le bien et le mal *. » A ce beau devoir William Burnes

1 The Vision.

2 Autobiographical lutter to D^ Moore.