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celui des autres villageois ; « quel rustaud ! » s'était écriée une dame à qui on l'avait désigné dans la rue '. S'il entendit ce jugement il dut y être péniblement sensible. Quelques semaines après son arrivée, il prit des vêtements plus appropriés à son nouveau milieu et se mit à la mode. 11 adopta le costume que portaient alors volontiers les libéraux, lequel était aux couleurs de Fox. Cette transformation accomplie, il parut en habit bleu à boutons de métal, en gilet rayé de bleu et de jaune, en culottes de daim collantes et en bottes à revers qui venaient au-dessous du genou ^. Sa cravate de. batiste blanche était nettement arrangée ; ses cheveux noirs, sans poudre à une époque oii on en portait généralement, étaient noués par derrière et sur le devant couvraient son front^. Sa mise était toute changée, bien qu'elle conservât encore quelque chose de rustique qu'il aurait peut-être essayé vainement de faire disparaître. « Son costume, dit Dugald Stewart, était parfaitement approprié à sa condition, simple et sans prétentions, mais avec une attention suffisante à la netteté. Si j'ai bonne mémoire, il portait toujours des bottes ; et quand il était particulièrement en cérémonie, des culottes de daim 3. » Un de ceux qui le virent le mieux à cette époque, Walker, dit qu'il était simplement mais convenablement vêtu, dans un genre qui tenait le milieu entre le costume de fête d'un fermier et celui de la compagnie à laquelle il était maintenant mêlé ; « à tout prendre, d'après sa personne, sa physionomie et son vêtement, si je l'avais rencontré près d'un port de mer et qu'on m'eût demandé de deviner sa condition, j'aurais probable- ment conjecturé qu'il était un capitaine de navire marchand, de la classe la plus respectable *. » C'était une preuve de tact parfait que d'avoir du premier coup, choisi ce costume indépendant, fait pour ses habitudes de tenue et néanmoins assez élégant.

La première fois qu'il entra dans un salon, on dut regarder avec curiosité ce jeune paysan, déjà un peu voûté par l'effort, comme le laboureur de Virgile qui pèse sur la charrue. Un de ceux qui l'exami- nèrent avec le plus d'intérêt a conservé l'impression de sa première apparition. « Sa personne, quoique forte et bien prise et de beaucoup supérieure à ce qu'on pouvait attendre chez un laboureur, était un peu lourde de dessin. Sa stature semblait moyenne bien qu'elle fût plus grande, parce qu'il ne se tenait pas droit. Son visage n'avait pas cette forme élégante qui est fréquente chez les classes supérieures; mais il était viril et intelligent, marqué par une gravité pensive qui s'assombrissait jusqu'à la dureté. C'est dans son large œil noir qu'était la marque la

1 AUan Cunningham. Life of Burns, p. 44.

2 AUan Cunningham. M. — et Chambers, tom II, p. 14.

3 "Walker. Life of Robert Burns, p. lxxii.

  • Account of Burns, by Professer Dugald Stewart, Gurrie.

5 Walker. Id. p. LXXii.