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Faisaient encore retentir les arches brisées de . entrée ,

Que des visages farouches, cousus de cicatrices,

Regardaient par les barreaux rouilles des fenôti-es ;

Et sans cesse, au foyer d'hiver,

J'écoutais de vieilles histoires de joie et de peine,

Les détours des amants, la beauté des dames ,

Les charmes des sorcières, les armes des guerriers ^

L'enfant qui écoulait toutes ces choses était, on le sait, Walter Scott, et on comprend pourquoi il devait surtout rendre le côté historique et dramatique de cette poésie, dans ses longs poèmes, qui sont comme des ballades amplifiées et tournées au récit.

Au moment même oii Burns passait dans la vallée d'Ettrick, il y avait, parmi les bergers qui y gardaient les troupeaux, un garçon de dix- sept ans, aux yeux bleus clairs Scandinaves, aux longs cheveux , gauche, rêveur, sauvage, presque farouche, en qui opérait également le charme de ces mêmes montagnes et de ces mêmes chansons. Sa vie, moins variée que celle de Burns, est peut-être plus étrange. Il n'avait été à l'école que jusqu'à apprendre à lire et à écrire en grosses lettres d'un demi-pouce, qui étaient plutôt de lourds dessins ; mais il avait entendu raconter des aventures de fées , de lutins et d'elfes. Toute une mythologie légère avait pris demeure en sa tête, pendant ses longs isolements de pasteur. Les nuits immenses, tantôt calmes et mystérieusement bleuâtres, tantôt pleines des hurlements de l'orage et de la danse des éclairs ; les crépus- cules du matin et du soir, dans ce pays oii les brouillards mêlés de lumières dissolvent le paysage, le font ondoyer et, au moindre coup de vent , le remuent , le déplacent , le rapprochent ou l'éloignent , le transforment, en changent les lignes, les nuances, en font un nuage féerique, une vision impalpable, un rêve ; tout avait donné à ces histoires un royaume fait pour elles. Et dans cette atmosphère rêvait et se formait celui qui allait être le plus grand poète paysan que l'Ecosse ait produit, après Burns. Car lui aussi a avoué qu'il devait sa poésie à cette influence.

aimez le savoir mystique et sublime

Des histoires féeriques des anciens temps !

Je les ai apprises dans la glen solitaire.

Aux demeures les plus reculées des hommes,

Où jamais ne passait un étranger.

Par les nuits d'été et les jours d'hiver.

Pas un paysan, pas une chaumine ;

Nous n'avions causerie qu'avec le ciel.

Avec les voix qui chantaient à travers les nuages.

Et les orages naissants autour de nous suspendus.

Oh, lady 1 jugez si vous le pouvez,

1 Walter Scott, Marmion. Introduction to Canto m.