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Page:Angellier - Robert Burns, II, 1893.djvu/257

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repos définitif. Il a reïidu cela avec une vigueur qui ne va pas loin de celle de Poe.

Et toi, puissance hideuse que la Vie abhorre,

Tant que la Vie peut fournir un plaisir,

Oh ! écoute la prière d'un misérable !

Je ne recule plus, effrayé, épouvanté ;

J'implore, je mendie ton aide amicale,

Pour clore cette scène de soucis !

Quand mon âme, dans une paix silencieuse,

Quittera-t-elle le jour morne de la vie ?

Quand mon cœur fatigué cessera-t-il ses battements,

Froide poussière dans l'argile ?

Plus de crainte alors, plus de larme alors,

Pour mouiller ma face inanimée ;

, Être serré, être étreint.

Dans ton glacial embrassement ! *

Ce goût de la mort fut également ressenti par Shelley. Trelawny raconte qu'un jour il dut le repêcher au fond de l'eau, oii il s'était laissé couler et où il s'était roulé « comme un congre » en attendant paisible- ment de mourir. Mais chez Shelley, c'était moins la lassitude de la vie présente que l'attrait de la vie commune, et le dessein de se réunir à la vaste existence universelle.

Le pauvre Burns avait de plus, à un haut degré, le sens des erreurs de la vie, de ses faiblesses. Ses propres souvenirs lui avaient enseigné combien les meilleures résolytions sont proches des défaillances, combien nos efforts vers le mieux trébuchent parmi les folies et les fautes.

La dame Vie, bien que la fiction puisse l'attifer

Et l'orner de fausses perles et de clinquant.

Oh ! vacillante, faible et incertaine,

Je l'ai toujours trouvée,

Toujours tremblante, comme une branche de saule,

Entre le bien et le mal 2.

Avec ce sentiment lui revenaient les regrets et parfois les remords des mauvais passages de son passé. Il avait assez souffert, et il s'était assez forgé de malheurs, pour comprendre les leçons que la vie contient toujours et qu'elle inflige parfois. Dès qu'il touche à ce point, il devient grave. En quelque endroit de presque toutes ses pièces, le ton comique se suspend et les paroles sérieuses arrivent. Il fait, en repassant à travers ses propres erreurs, sa récolte de sagesse. Ce sont souvent des regrets, souvent des résolutions, parfois de véritables remords. Quelquefois, il

1 Ode to Ruin.

2 To Colonel de Peyster.