Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/199

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de l’Église primitive, ce sont là des attaques qui ne lui ont pas été ménagées dans la polémique moderne ; elles datent de loin ; parmi les ordres qui se forment pendant le xiiie siècle celui des Frères Mineurs, rival de celui des Dominicains, a pour règle et pour principes le mépris des richesses et ce principe engendrera avec Bernard Délicieux des querelles et des hérésies.

Les attaques suivantes ne sont pas moins graves.

Les moines sont si cupides, si pleins d’orgueil et de mauvais désirs, qu’ils connaissent cent fois plus de ruses que voleurs et malfaiteurs ; s’ils peuvent causer avec vous de vos secrets vous ne pourrez pas plus vous en défaire que s’ils étaient vos frères.

Voilà comment ils bâtissent leurs maisons et créent leurs beaux vergers ; mais ce ne sont pas leurs sermons qui convertiront Turcs ou Persans, car ils ont trop peur de passer la mer et d’y mourir ; ils aiment mieux bâtir ici que se battre là-bas (en Terre Sainte).

Pour de l’argent vous obtiendrez d’eux votre pardon, quelque mal que vous ayez fait ; pour de l’argent ils sont tellement ingénieux qu’ils donnent la sépulture aux usuriers ; mais ils ne visitent, ni n’accueillent ni n’ensevelissent le pauvre.

Ils ne font que quêter toute l’année ; puis ils s’achètent de bons poissons, beau pain blanc, bons vins savoureux, bons vêtements chauds contre le froid ; plût à Dieu que je fusse de tel ordre, si je pouvais être sauvé[1] !

Et voici enfin contre les ordres religieux un dernier trait plus violent que les autres.

Les vautours ne sentent pas plus vite la chair puante que les clercs et les frères Prêcheurs ne sentent où est la

  1. Ibid., no 1228.