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Page:Année galante ou Étrenne à l’amour, 1773.djvu/45

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No VI.

CONTE
Le devant Razé


Rien de plus simple que l’amour, rien de plus varié, rien souvent de plus Bizarre que son culte, on a vu Pechote[1] prendre plaisir a insinuer et a se faire insinuer des plumes de Paon dans le derrière, un particulier avoit une manie aussi singuliere que celle la, il goutoit une satisfaction extreme a voir razer le devant d’une femme qu’il payoit expres, la ceremonie se faisoit tous les deux jours et voici comme on y presidoit la patiente joliment cœffée et la gorge a demie nue, avoit soin de prendre une chemise blanche et parfumé un deshabillé elégant et dans cet acoutrement atendoit son original qui ordinairement ne tardoit pas a paroitre suivi de la femme de chambre Barbiere il n’etoit pas plutôt entré qu’elle se levoit et lui sans preambule n’y autre preparation alloit a elle et de ses propres mains levoit juppes et chemises, dessous laquelle il sentoit pour savoir si on avoit eut soin de mettre des odeurs, elle etoit ensuite obligé de soutenir ses habit elle meme nue jusqu’au nombril, alors la Barbierre remplissoit son petit ministere, et lui pendant le tems considerent attentivement les objets qui etoient devant ses yeux tant le principal que les accessoires se provoquoit du mieux qu’il lui etoit possible au plaisir, quand il le sentoit approcher il poussoit de la main la femme de chambre et vis-a-vis sa maîtresse il dirigoit son instrument sur la partie qui venoit d’etre savonné et qui etoit ou a moitié ou tout a fait razé il la savonoit une seconde fois avec ce dont on peut se douter mais pas aussi abondament.

  1. Ce Pechote ou pexoto est un Banquier de Religion et Juif de profession.