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égalité d’humeur et un si vif désir d’être agréable à tous qu’on doit, malgré tout, lui en savoir gré.

— Oui, répondit Mr. John Knightley, avec une pointe de malice, il semble on ne peut mieux disposé à votre égard.

— À mon égard, répliqua-t-elle avec un air d’étonnement, vous imaginez-vous que Mr. Elton porte ses visées sur moi ?

— Je vous avoue que je me le suis parfois imaginé, Emma, et si vous n’y avez jamais songé, vous feriez bien d’y réfléchir maintenant.

— Mr. Elton penser à moi ! Quelle idée !

— Je ne dis pas qu’il pense à vous, mais il serait prudent de vous rendre compte de ses sentiments et de régler votre conduite comme il vous semblera bon. Je trouve que vous avez l’air de l’encourager. Je vous parle en ami, Emma. Réfléchissez, pensez à ce que vous faites et à ce que vous avez l’intention de faire.

— Je vous remercie, mais je puis vous assurer que vous vous trompez. Mr. Elton et moi sommes de bons amis, rien de plus. — Et elle continua sa promenade, s’amusant à méditer sur les méprises qu’engendre la connaissance imparfaite d’une situation et sur les erreurs dans lesquelles tombent constamment ceux qui ont le plus de prétentions à avoir du jugement. Elle n’était pas très flattée que son beau-frère la jugeât aveugle, ignorante et en grand besoin de recevoir de bons conseils ». [1]

Quand elle est obligée de se rendre à l’évidence et de reconnaître qu’elle s’est trompée en se persuadant que Mr. Elton était épris d’Harriet, Emma convient qu’elle a été imprudente et volontairement aveugle :

« Comment avait-elle pu se méprendre de la sorte ! Mr. Elton lui affirmait que jamais, jamais de la vie, il n’aurait pu donner une pensée à Harriet. Emma essayait de jeter un regard en arrière, mais tout lui paraissait confusion et ténèbres. Sans doute, elle s’était mise cette

  1. Emma. Chap. XIII.