Page:Annales de la propagation de la foi, Tome 19, 1847.djvu/645

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au Grand Lama, l'importance du commerce y attire encore les marchands de toutes les contrées de l'Asie ; ainsi, la capitale du Thibet doit être considérée comme le rendez-vous continuel de divers peuples qui incessamment vont et viennent par ces immenses régions, sans jamais rencontrer la moindre entrave à leur liberté.

« Dès notre arrivée, nous étant aperçus que nous pourrions inspirer de l'inquiétude si l'on venait à nous prendre pour des Anglais, redoutés à cause de leur donation dans l'Inde et de leurs victoires récentes sur la Chine, nous nous présentâmes aussitôt aux autorités thibétaines, et nous leur déclarâmes que nous étions français et prédicateurs de la Religion chrétienne. Le lendemain, nous fûmes invités à nous rendre chez le premier ministre, régent de l'empire pendant la minorité du Grand Lama qui est actuellement un enfant de huit ans. Il nous questionna beaucoup sur notre, patrie, dont le nom même lui avait été jusqu'alors inconnu ; la bonté et l'intérêt qu'il nous témoigna, nous firent comprendre combien les détails que nous venions de lui donner avaient fait une heureuse impression sur son esprit. Les entretiens qu'il eut ensuite avec le gouverneur turc (1)[1], qui se rend fréquemment à Calcutta pour des affaires commerciales, ne firent que le confirmer dans ses bonnes dispositions à notre égard. Alors il nous déclara qu'il nous prenait sous sa protection immédiate, et que nous pouvions librement séjourner dans le pays, sans que personne eut le droit de s'immiscer dans nos affaires. Bien plus, ayant appris qu'à notre arrivée nous n'avions pu nous procurer qu'un logement étroit et peu commode, il poussa la bienveillance jusqu'à nous céder une de ses maisons, où nous pûmes ériger une chapelle et vaquer librement aux exercices de notre ministère. Nos rapports avec le Régent devinrent ainsi de jour en jour plus intimes ; il aimait à discuter avec nous les vérités de la Religion chrétienne, et demandait toujours avec intérêt de nouveaux détails sur nos lointains pays d'Europe.

  1. (1) Chacun des peuples divers qui fréquentent Lassa, a dans cette capitale son gouverneur ou chef particulier, qui répond civilement de la conduite de ses nationaux. Le gouvernement thibétain ne connaît pas les individus, il ne traite qu'avec leurs chefs.