Page:Annales de la propagation de la foi, Tome 19, 1847.djvu/755

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prestige dont nous venons de parler, étaient considérés comme des divinités véritables. Toujours nous avons remarqué en eux une parole affable et prévenante, une physionomie douce, des manières polies et honnêtes ; mais avec cela, des yeux effarés, respirant le feu de la jalousie et de la haine. On était comme saisi d'une sorte de stupeur en voyant le contraste de leurs regards avec l'air ingénu de leur visage ; il semblait que c'étaient des yeux de démons masqués sous la figure d'un ange.

La souveraineté du Thibet est donc, comme nous l'avons dit, entre les mains du grand Lama. Au-dessous de lui est un Roi, chargé de l'administration civile. Ce doit aussi être un Lama : on l'appelle Sato-Nomakau. Pour compléter le gouvernement, il y a quatre ministres qui dirigent les affaires, et en soumettent la décision tant au Roi qu'au Pontife suprême.

A notre arrivée, le Talaï-Lama se trouvait être un enfant ; le Roi, jeune Lama de dix-huit ans, venait d'être élu, à peine prenait-il possession du trône ; de sorte que tout le poids du gouvernement retombait sur les quatre ministres. Le premier d'entre eux, nommé S'Hyadja-Kaloum, était Régent ; c'est de lui que nous reçûmes un si bienveillant accueil. Homme du plus grand mérite, il est vénéré dans tout le Thibet et même dans les pays circonvoisins ; s'il se convertissait, le Christianisme verrait aussitôt s'ouvrir une large voie à ses progrès dans toutes ces vastes contrées.

La secte de Tchoukaba, dominante aujourd'hui dans le Thibet, s'y établit sur la fin du 13e siècle, et dès son origine, elle y prit de rapides accroissements. Quelques années après que Tchoukaba eut été élevé au pontificat suprême, il fonda le couvent de Caldau, à dix lieues au sud de H'Lassa. Cet établissement compte aujourd'hui trois mille Lamas, et on l'ouvre indistinctement