Page:Annales de la propagation de la foi, Tome 19, 1847.djvu/774

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perdus de vue, le vent était devenu si violent et les vagues tellement furieuses, que leur navire avait été submergé. Un Mandarin, plusieurs hommes de l'équipage et tous les effets avaient péri. Quelques matelots seulement avaient eu assez de bonheur pour saisir un des câbles du bâtiment qui flottait renversé, et étaient ainsi parvenus à sauver leur vie du naufrage.

Cinquante-neuf jours après notre départ de la capitale du Su-tchuen, nous arrivâmes dans la métropole du Hou-Pé, appelé Ou-tchang-Fou : c'est dans cette ville que six ans auparavant, M. Perboyre, notre confrère, en compagnie duquel j'étais venu en Chine, avait eu, après de cruelles tortures et de longs interrogatoires, le bonheur de donner sa vie pour le nom de Jésus-Christ. Nous parcourûmes, le cœur plein de respect et pénétrés de la plus profonde émotion, ces lieux empreints de si glorieux et de si touchants souvenirs. Heureux confrère, nous disions-nous l'un à l'autre, à qui Dieu a fait la grâce de sortir, la palme du martyre à la main, de cette vallée de larmes, où il faut passer ses jours dans des périls sans cesse renaissants, dans de continuelles et désolantes incertitudes !

Dans la province du Hou-Pé, qui forme le Vicariat apostolique de Mgr. Rizzolati, la persécution régnait de toutes parts à l'époque de notre passage ; et il n'y avait que peu de jours qu'un religieux espagnol, M. Navarro, venait de tomber entre les mains des satellites.

De là nous continuâmes notre route vers Canton, en traversant la province du Kiang-Si, qui forme le Vicariat apostolique de Mgr. Laribbe. La persécution n'y était pas moins ardente que dans les autres endroits; nous le sûmes par l'entremise d'un chrétien, qui parvint à insinuer secrètement un billet dans la chambre où nous étions gardés.