Page:Annales de la société Jean-Jacques Rousseau, tome 8.djvu/30

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Ce n’est pas à dire que toutes les contradictions de détail tombent ; mais la plupart s’effacent et s’annulent dans la constance de la direction générale.

Rousseau, jadis, imaginait le contrat entre le peuple et le chef : mais il s’est aperçu que ce mode de contrat suppose une hiérarchie déjà formée, ou une conquête ; cherchant le contrat véritablement originel, primitif, constitutif de l’ordre social, il a dû enfin le trouver dans un pacte qui unit les individus égaux en corps de nation du peuple au chef, il n’y a pas contrat, mais mandat. Faut-il appeler ce changement de vues contradiction  ? ou correction ? ou développement et précision ? C’est le passage d’une conception banale à une doctrine originale, et surtout d’un point de vue historique (conjectural) à un point de vue rationnel (idéaliste).

On pourrait avec plus de vraisemblance trouver une opposition entre le chapitre de la Religion civile et les idées de tolérance que Rousseau a souvent exprimées. Je vois bien comment, par quelles circonstances et par quels exemples historiques, ce chapitre s’explique. Je vois même comment on pourrait le tourner, l’interpréter, le rectifier, pour l’adapter à la doctrine de la tolérance : mais il ne faudrait pas seulement rabattre du sens violent de certaines expressions, il faudrait changer les termes mêmes les plus importants, et ce ne serait plus la pensée de Jean-Jacques. Pensons donc que tantôt il a été prêcheur de tolérance et tantôt organisateur d’intolérance, à moins que nous ne préférions douter qu’il ait été jamais absolument tolérant. Peut-être le chapitre de la Religion civile doit-il être retenu comme un avertissement de mesurer toujours strictement la portée des déclarations de Rousseau, et de