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DES AVEUGLES.

compter les lettres affectées d’accens ou d’indices ; la case qui contiendrait tous ces divers alphabets devrait donc être très-grande : ce qui exigerait plus de temps pour y choisir les caractères, et rendrait ainsi les calculs fort longs. Il est d’ailleurs presque impossible de représenter, avec des caractères mobiles, toutes les diverses sortes de fonctions algébriques, et cela quelque complète que la case puisse être d’ailleurs. Si l’on avait, par exemple, cette quantité il faudrait que la case contînt trois sortes de caractères, différant uniquement entre eux par la place qu’ils occuperaient sur leurs parallélipipèdes respectifs ; ce qui, en obligeant de donner de grandes dimensions aux parallélipipèdes, exigerait qu’on donnât une largeur proportionnée aux ; traverses entre lesquelles les queues de ces parallélépipèdes doivent être maintenues, et diminuerait conséquemment le nombre de ces traverses, pour une planche de dimensions données.

Gêné par ces obstacles, dès mes premiers pas dans l’étude de l’algèbre, j’ai pris le parti de me créer des notations mieux appropriées aux seules ressources dont il me soit permis de disposer. Ainsi, par exemple, au lieu de j’écris  ; pour j’écris et ainsi du reste. Privé aussi de l’alphabet grec, je renverse les lettres romaines, pour suppléer à celles de cet alphabet ; de manière que, par exemple, pour représenter j’écris ɐ. Les parenthèses sont ordinairement de toutes sortes de grandeurs ; mais, dans la case d’un aveugle, elles sont nécessairement limitées ; il m’a donc fallu créer encore des notations pour les remplacer. Enfin, je suis presque toujours forcé d’inventer de nouveaux symboles, à mesure que les calculs et les formules se prolongent et se compliquent.

Ce n’est guère, au surplus, que dans ce cas que j’ai recours aux caractères mobiles ; car on ne peut se dissimuler que leur usage entraîne toujours quelque longueur et quelque embarras. L’aveugle doit donc avoir une planche ; mais il doit, en même temps, apprendre, peu à peu, à s’en passer, du moins dans les cas les plus ordinaires. Il faut, par exemple, qu’il puisse suivre de tête une opération que l’on fait