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Page:Annales de mathématiques pures et appliquées, 1830-1831, Tome 21.djvu/208

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Mais il importe de remarquer qu’il n’est pas au pouvoir des mots de changer l’essence des choses, que tout est toujours égal de part et d’autre dans un échange dont la nature ne saurait conséquemment dépendre de celle de l’un des objets échangés. Lorsque, par exemple, je vends du blé en écus, et qu’ensuite avec mes écus j’achète du vin, je consomme tour à tour deux échanges, tout comme si j’avais d’abord échangé mon blé contre de l’huile, et celle-ci ensuite contre du vin ; car, que l’intermédiaire soit écus ou huile, le résultat final est exactement le même dans les deux cas. Lors donc qu’un consommateur échange ses écus contre le pain d’un boulanger, au lieu de dire que ce boulanger vend son pain, que le consommateur l’achète et que les écus qu’il livre en sont le prix, on serait tout aussi fondé à dire que ce dernier vend ses écus au premier, qui les achète au prix du pain qu’il lui livre ; c’est même là une chose qu’il ne faut pas perdre un seul instant de vue, quand on veut raisonner sainement sur ces matières.

Or, nous avons observé plus haut que les échanges entre les mêmes objets se faisaient, d’époque à autre, dans des proportions très-variables, et, qu’on ne donnait qu’une petite quantité d’une matière rare et recherchée, en échange d’une grande quantité d’une autre matière plus abondante et moins demandée ; il devra donc en être encore de même lorsqu’un des objets d’échange sera du numéraire métallique. Lorsqu’il en faudra donner beaucoup pour obtenir une petite quantité des autres objets échangeables, au lieu de dire, comme on a coutume de le faire, que les denrées sont chères, on sera tout aussi fondé à dire que l’argent est à bas prix. On pourra dire, à l’inverse, que l’argent


    ciété accorde aux possesseurs d’argent, uniquement parce qu’ils ont de l’argent, et sans aucan égard aux moyens plus ou moins honnêtes à l’aide desquels ils l’ont acquis.