Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/128

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Dans l’aristocratie, il est de mode de faire élever les enfants au domicile paternel par un lama engagé à grands frais à cet effet ; mais cette éducation est trop dispendieuse pour être générale et la plupart du temps on se contente d’envoyer les jeunes garçons au monastère le plus proche pendant quatre ou cinq ans, lors même qu’ils ne sont pas voués à la vie religieuse, et là, moyennant une redevance modique, on leur apprend à lire, à écrire, à psalmodier les livres sacrés et un peu de calcul. Cet usage est également adopté par la classe moyenne ; mais l’enfant du peuple, dans les villages éloignés ou sous la tente, est voué à une ignorance complète, à moins qu’il n’ait la chance, bien rare, de rencontrer dans son entourage quelque lama, réfractaire à la discipline et déserteur du cloître, qui lui serve de maître.

L’éducation des filles est encore plus négligée que celle des garçons au point de vue de l’instruction. On ne leur enseigne guère que les travaux du ménage et l’art d’être habiles commerçantes, ce qui comporte savoir compter en se servant des grains du chapelet en guise de machine à calculer[1]. Quelques-unes cependant savent un peu lire et plus rarement écrire, soit qu’elles aient reçu des leçons de leurs parents, soit que, favorisées par le sort, elles aient vécu dans le voisinage d’un couvent de religieuses bouddhistes possédant des nonnes capables d’enseigner le peu qu’elles savent elles-mêmes.

2. Langue et écriture. — La langue tibétaine est l’une des dernières dont se soient occupés les linguistes européens ; il n’est donc pas étonnant qu’aujourd’hui encore on ne soit pas absolument fixé sur son origine exacte, malgré les savantes dissertations dont elle a été l’objet depuis le

  1. C’est, du reste, la méthode habituelle de tous les Tibétains ; les savants seuls se servent des chiffres.