Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 12-13.djvu/85

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où le bois est tellement rare que le seul combustible employé pour la cuisine et le chauffage est la fiente séchée des animaux domestiques. Aussi est-il réservé aux lamas et aux personnes des hautes classes.

Quand il s’agit d’un lama, aussitôt que le mort a rendu le dernier soupir, on l’assied dans une attitude de dévotion, les jambes croisées de telle façon que le dessus du pied soit appuyé sur la cuisse opposée et la plante en l’air, posture qui est celle des images des Bouddhas. La main droite repose ouverte et le pouce replié dans la paume de la main sur la cuisse droite ; le bras gauche est replié contre le corps, la main ouverte et le pouce écarté de manière à former un angle droit avec la main à la hauteur de l’épaule, attitude de la méditation parfaite. Les yeux à demi fermés sont dirigés vers le sol pour indiquer que, non seulement toutes les fonctions du corps sont suspendues, mais encore que les facultés de l’âme sont tout entières absorbées dans la méditation. Le corps est ensuite revêtu du vêtement religieux et porté en grande pompe sur un bûcher, dressé autant que possible sur une éminence. Lorsque le cadavre est consumé, on en recueille précieusement les cendres que l’on dépose dans l’intérieur d’une statuette de cuivre représentant une divinité ou, plus rarement, le personnage lui-même[1]. Quelquefois on pétrit ces cendres avec des résines parfumées et on en modèle une petite statuette. Inutile de dire que ces statuettes sont religieusement conservées dans le temple du monastère auquel appartenait le défunt.

Si le mort est un laïque, les choses se passent à peu près de la même manière, sauf qu’on ne recueille pas les cendres. Aussitôt que la mort est constatée, le défunt ficelé, les genoux rapprochés du menton et les mains entre les jambes, dans un de ses vêtements habituels, est enfermé dans un

  1. S. Turner, Ambassade au Thibet, t. II, p. 9.