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ET OUVERTURE DU FLEUVE ROUGE AU COMMERCE

réponses évasives que j’ai dû considérer comme un aveu d’impuissance ou comme un refus de me satisfaire… En ne tenant aucun compte de mes avertissements réitérés, en ne donnant que des satisfactions dérisoires à mes réclamations les plus justes, le gouvernement annamite a violé l’une des clauses fondamentales du traité de 1862… »

Et en effet pour quiconque connait un peu les mandarins annamites, tergiverser et attendre tout du temps, quand il ne sont pas les plus forts, est le résumé de toute leur politique.

Le traité de 1862 se trouvait donc brisé par la conquête des trois provinces de l’Ouest. Les Annamites, dès ce moment, cessèrent tout versement sur ce qui restait dû de l’indemnité, soit 2,200,000 piastres, dont la moitié à l’Espagne. Un an après mon entrée au Tong-kin, la Revue maritime et coloniale (octobre 1873) donnait sur l’état de nos relations avec l’Annam, les détails suivants  :

« L’occupation des trois provinces occidentales par l’amiral de la Grandière a complètement modifié la situation créée par le traité de 1862. Depuis plus de trois ans, nous demandons au gouvernement annamite de reconnaître franchement le nouvel état de choses, moyennant des concessions que nous sommes disposés à faire. L’amiral Ohier n’a autant prolongé son séjour en Cochinchine que dans l’espoir de conclure cet arrangement définitif  ; il a payé de sa vie son dévouement. Peu après l’arrivée de son successeur intérimaire, la guerre désastreuse de 1870 a éclaté  ; elle a eu dans l’extrême Orient un très grand retentissement, et nos voisins en ont prudemment attendu les conséquences, pour régler d’après elles leur ligne de conduite.

« M. le contre-amiral Dupré vient d’être investi de pleins pouvoirs pour traiter au nom du gouvernement de la République. Il s’est hâté d’en informer la cour de Hué, en insistant pour la reprise immédiate des négociations  ; il attend encore la réponse. »

Les concessions que nous étions disposés à faire, celles dont nous entretient la Revue maritime, étaient l’abandon aux Annamites, à titi-e de compensation, des sommes considérables qui nous étaient dues en exécution du traité de 1862. Les Annamites fermèrent les oreilles à toute entente. Ou verra dans la suite le changement que ma venue au Tong-kin allait faire naître dans leur attitude à notre égard.