qu’un complot formé contre la vie du prince et qui devait éclater à Marseille, avait été découvert et était venu provoquer la juste flétrissure des hommes même les moins disposés à approuver la politique et les vues du gouvernement. Une machine infernale, plus savamment combinée encore que celle qui avait été autrefois dirigée contre le roi Louis-Philippe et avait fait tant de victimes autour de lui, devait frapper le prince et son escorte à l’entrée de la ville. La police avait su prévenir ce danger ; mais l’impression, qui arriva un peu amoindrie à Paris et dans le reste de la France, eut parmi les populations du midi un retentissement qui ne fit qu’ajouter à leur sympathie. Un spectacle rare, celui de la flotte tout entière assemblée à Toulon pour célébrer le passage du chef de l’état, devait d’ailleurs intéresser la curiosité publique, et attirer dans ce grand port militaire de la Méditerranée un concours immense qui ne pouvait point nuire à l’éclat du voyage princier. Ce n’est pas que le prince-président rencontrât partout des dispositions également dévouées et respectueuses. Ainsi à Montpellier les cris de vive l’amnistie ! se firent entendre dans les masses parmi ceux de vive Napoléon ! Au reste, le sang-froid ne fit point défaut au président de la république en présence de ces demandes d’amnistie qui lui étaient adressées à brûle-pourpoint et sous une forme un peu brusque. « J’entends des cris de vive l’amnistie ! répliqua le prince ; l’amnistie est plus dans mon cœur que dans votre bouche. Si vous la désirez, rendez-vous-en dignes par votre sagesse et votre patriotisme. »
Mais le résultat vraiment important de ce voyage, ce fut le discours que le président de la république devait prononcer à bordeaux, en résumant toutes les impressions qu’il avait recueillies dans cette longue excursion, si heureusement accomplie, et en faisant connaître au pays qu’il était prêt à se rendre, s’il le fallait, aux vœux exprimés pour le rétablissement de l’empire. Le discours de Lyon avait été, en quelque sorte, la préface du voyage dans les départemens du midi ; le discours de bordeaux en était comme la conclusion. Le prince y parlait d’ailleurs sans réticence, avec une satisfaction qu’il ne cherchait pas à dissimuler, du mouvement qui poussait le pays vers l’empire, et il traçait, en termes de nature à frapper l’imagination, le programme du gouvernement qu’il se déclarait prêt à inaugurer. A ce titre, le discours de Bordeaux n’a pas moins d’importance historique que le discours de Lyon.
« Messieurs, dit le président de la république, l’invitation de la chambre et du tribunal de commerce de Bordeaux, que j’ai acceptée avec empressement, me fournit l’occasion de remercier votre grande cité de son accueil si cordial, de son hospitalité si pleine de magnificence, et je suis bien aise aussi, vers la fin de mon voyage, de vous faire pari des impressions qu’il m’a laissées. Le but de