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on peut évaluera 400,000 hommes ce qui s’est présenté devant nous. »

M. Thiers explique ensuite la première faute militaire. « En présence de l’ennemi, dit-il, qu’a-t-on fait ? —r Eh bien, on est resté dans une position qui, tout le monde le reconnaît, n’avait rien de militaire ; 250 ;000 hommes répandus sur une ligné de cinquante lieues, de Thionville vaux bords du Rhin. Nous avions notre droite au delà des Vosges et dans une position où nous pouvions à peine la secourir. Nous sommes restés vingt jours dans cette situation, devant 400,000 hommes. Qu’est-il arrivé ? Tout le monde aurait pu le prévoir : notre droite, placée au delà des Vosges, au delà de la force principale de notre armée, a élé enlevée ;elle a opposé une résistance héroïque ; dans les plus beaux jours de notre histoire, il ne s’est rien fait de plus grand que les combats ! de Reischoffen, ceux qui avaient précédé et ceux qui ont suivi ; on s’est battu un contre trois. (C’est vrai ! — Très-bien !) — Après l’immense faute d’avoir déclaré la guerre en huit jours, faute politique qui a entraîné toutes les fautes administratives qui ont suivi et -nous ont perdus, on a commis la faute militaire de rester vingt jours en présence de l’ennemi, sans prendre ce qu’on appelle une position militaire, et notre droite a élé exposée à périr. »

Arrivant à la seconds faute militaire, le président de la République s’exprime en ces termes : « Après nos premiers échecs qu’j avait-il à faire ? On est resté consterné, hésitant et retenu, par quoi ? par cette place de Metz qui, abandonnée, semblait être l’abandon de la Lorraine et de TAlsace d’un seul coup. L’armée qui venait d’enlever noire - droite marchait pour nous tourner. En restant dans cette position, nous étions sûrs d’être enveloppés. Qu’y avait-il à’faire ? Prendre son parti ; faire quelques marches en arrière pour se retirer de la ligne de la Moselle sur la ligne de là Meuse. Mais abandonner Metz, abandonner la Lorraine !./. On a été consterné, et l’empereur s’est retiré. Certes, l’armée était soumise, et je dirai, moi qui respecte ceux qui n’ont plus le pouvoir, moi qui respecte les malheurs mêmes mérités, qu’il n’a pas servi l’armée en se retirant. S’il avait laissé l’autorité à un autre, peut-être aurait-il rendu service ; mais il a laissé l’armée dans la confusion dans laquelle il était lui-même après ce grand désastre. Ne changeant pas de position, nous avons été enveloppés. Voilà la secondé faute militaire ; elle est évidente comme la lumière, et l’histoire ne pourra pas dire autre chose que ce je dis devanlvous.

« II restait une troisième faute-à commettre. Oh ! sans doute si nous avions eu une armée de réserve toute prête, il eût fallu tout de suite chercher à percer cette muraille d’airain qui se

formait autour de notre armée ; mais il.a fallu vingt-cinq jours pour en former une. A Châlôns, avec les débris de cette brave aile droite qui s’était si vaillamment défendue, avec le corps du général Douai, qui était à Belfort, avec le reste de nos cadres, on a formé l’armée de Sedan ; il a fallu vingt-cinq jours. Mais il était évident qu’il s’était organisé autour de l’armée du Rhince que j’ai appelé bien des fois, dans de cruelles soirées, que je vais vous rappeler, une muraille d’airain qu’on ne pouvait plus percer. » Et M. Thiers rappelle ici qu’au sein du conseil ! de défense dont il était membre, il ne cessait, ! d’accord avec le général Trochu, de déplorer la tentalivede débloquementdu maréchal Bazaine, qui devait avoir pour résultat le bloCus de Paris, et la capitulation de la capitale de la France après la capitulation de Metz. Après avoir ainsi exposé la faute politique et les trois fautes militaires, il a fait connaître les raisons qui, après l’anéantissement de l’année régulière ; ont paralysé tous les efforts tentés par la France pour réparer cet immense désastre. Voici ses propres paroles :

« Il est parfois arrivé à la France de perdre une ou deux armées et de ne pas périr. Mais comme nos cadres étaient vides, comme nos

régiments comptaient 1,100 à 1,200 hommes,

quelques-uns de 1,300 à 1,400, tout au plus, il a fallu faire nombre, en envoyant tous nos régiments sur le théâtre de la guerre. Tout notre effectif militaire en cadres a été pris à Metz et à Sedan. (C’est vrai !) Et Ton nous demande pourquoi la France ne s’est pas relevée, malgré le patriotisme qu’elle a déployé, malgré ses 600,000 mobiles, qui tous n’étaient pas devrais isoldats, mais qui tous, ou presque tous, avaient un cœur d’homme et un cœur de Français. Pourquoi, malgré tout cela, on ne s’est pas relevé ? C’est qu’on n’avàitpas de cadres ! (C’est vrai ! — Très-bien !) i -■•’"'-•

« J’ai vu, sur la-Loire, des compagnies —ce iqui dépasse de beaucoup notre effectif ordinaire en fait de compagnies, — des compagnies de 100 hommes ayant un sous-lieutenant et un ou deux sous-officiers pour les conduire. Oui, Ta cause définitive de nos malheurs, celle qui résume et expliquëtous nos désastres, c’est que nous avons perdu, à Metz et à Sedan, — parce qu’on avait été, faute d’effectifs, obligé d’envoyer tous nos régiments sur le Rhin, — nous avons perdu, en un seul jour, en un seul instant, tout notre effectif militaire. Voilà la cause véritable de nos malheurs ; on s’égare quand on en cherche d’autres. Notre armée a été aussi brave que jamais, tout le monde le reconnaît, et les étrangers eux-mêmes le reconnaissent avec un orgueil bien entendu, car ils ne voudraient pas avoir triomphé de la France dégénérée. (Très-bien !)