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doon de la roche

(Malalandres dans N, Malingre dans F) avant l’exil du premier. Mais il ne faut pas perdre de vue que l’auteur de E s’est certainement permis de grandes libertés : son idée de faire entrer Olive dans un couvent (idée qui semble bien propre à un Espagnol dévot) a pu entraîner des modifications dans l’histoire de la jeunesse d’Enrrique (= Landri), qui ont fait disparaître la donnée de l’inimitié précoce entre les deux demi-frères, que l’auteur de O2 avait conservée.

On pourrait encore objecter que notre hypothèse de deux renouvellements anciens, qui auraient bouleversé toute l’économie du poème primitif, n’est guère conforme à ce qu’on sait de l’histoire des chansons de geste. Il est certain, en effet, que beaucoup de « renouveleurs » de chansons de geste ont respecté le plan original du poème qu’ils entendaient adapter au goût de leur temps, et se sont contentés de modifier certains détails ; mais d’autres ont procédé d’une façon plus radicale. On peut citer le poème d’Ami et Amile, composé au xive siècle, et conservé dans le manuscrit fr. 12547 de la Bibliothèque Nationale, où les données anciennes ont été complètement remaniées. Si l’on récusait cet exemple comme trop récent, nous rappellerions, outre le renouvellement de Berte au Grand Pied par Adenet le Roi, si différent de l’ancien poème tel qu’on peut le reconstruire, la seconde rédaction du Moniage Guillaume, où a été inséré le long épisode de Sinagon, qui ne se trouvait pas dans les versions anciennes du poème, et, avant tout, la Reine Sebile, cette chanson perdue que nous pouvons reconstituer à l’aide de plusieurs documents et qui diffère à tant d’égards du poème franco-italien de Venise, publié sous le titre de Macaire par A. Mussafia et par Guessard. En effet, si Guessard s’est trompé en admettant que le poème franco-italien qu’il éditait était la transcription pure et simple d’une chanson française, il n’en reste pas moins que ce poème suppose un texte