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la saga d’élie

mes le voulez[1], nous la brûlerons vive tout de suite, sans qu’il y ait aucun répit. » Quand Rosamonde eut entendu ses paroles, elle se courrouça fort : « Par ma foi, » dit-elle, « tu es le plus mauvais traître et le plus vil débauché et le plus grand menteur du monde, car tu as dis mensonge de moi[2] ; ce chevalier est un héros bien meilleur que toi et bien plus courageux. Misérable couard, » dit-elle, « c’est à toi qu’était proposé ce combat, et tu n’as pas osé le mener à bonne fin ; il sort maintenant pour combattre pour toi ; mais, par Mahon qui nous garde, si le roi et nos païens veulent avoir foi en mon conseil[3], jamais tu ne gouverneras le royaume, à cause de ta lâcheté pitoyable. » Quand Caïfas eut entendu cela, il la frappa de son poing avec toute sa force sur les dents, de sorte que ses lèvres se fendirent et que le sang en jaillit tout autour. Mais c’est bien imprudemment qu’il a porté les mains sur elle, car à cause du coup qu’il lui a assené, il sera frappé de mort encore avant ce soir.

(LXIII)

Élie est arrivé au champ en face de Jubien, et s’arrête. Quand Jubien le vit, il reconnut aussitôt le cheval, s’approcha de lui quelque peu et lui dit amicalement : « Qui es-tu, chevalier ? et qui t’a donné ce cheval ? Il n’a jamais été mon ami, celui qui l’a mis[4] en ta possession. Ta belle jeunesse est venue ici d’une façon bien imprévoyante, car elle va bientôt mourir. Je pense, » dit-il, « que Mahon est quelque peu fâché contre moi, car il a permis à Macabré de me tromper. Il m’a envoyé un méchant homme qui m’a débité des mensonges et des paroles trompeuses ; si je l’avais su, je l’aurais fait pendre et brûler ensuite sur un bûcher. Maintenant, pour

  1. C B D ajoutent : comme moi.
  2. C B tu mens maintenant un mensonge abominable ; D maintenant tu mens un mensonge odieux et infâme.
  3. C B D veulent comme moi.
  4. C B D te l’a donné.