Page:Anonyme - Huon de Bordeaux, chanson de geste.djvu/128

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Sommaire.

quoi je l’interrogeai sur le temple de Salomon : il ne m’en sut rien dire. Je lui demandai, noble empereur, s’il s’était acquitté de votre message pour le roi Gaudisse : il ne m’en put rendre compte. Alors, je fus saisi d’effroi ; je ne sus que faire d’abord, mais bientôt je songeai que j’étais votre homme lige, et, pour vous dire la vérité, noble empereur, craignant d’être accusé de trahison, j’ai emprisonné mon frère, sa femme, son compagnon, et je viens vous l’avouer. Usez-en maintenant comme vous le trouverez bon. » P. 279-282.

Douleur des barons. — Ils maudissent Gérard, dont ils soupçonnent la trahison. — L’empereur somme les otages de Huon de le lui livrer sous peine d’être pendus, puis, s’adressant au duc Naimes, il lui demande son avis. « Sire, dit Naimes, pourquoi vous cacher ma pensée ? Gérard est un traître. — C’est vous qui le dites, répond Gérard ; mais, par saint Pierre, j’ai de bons témoins de tout ce que j’ai avancé : et Gibouart, le baron, et cet abbé, qui est digne de foi, et le moine qui l’accompagne. — Il n’a dit que la vérité, s’écrient-ils tous les trois. — Par ma foi, dit le duc Naimes, vous êtes tous des larrons ! — Que me conseillez-vous donc, Naimes ? demande l’empereur. — Sire, dit le vieux duc, c’est une chose inouïe ! Il a jeté son frère en prison, et le traître vient vous le conter ! Par le Seigneur qui souffrit la passion sur la croix, si j’avais eu un frère ainsi banni de France et qui fût un jour revenu chez moi, je me serais cru un grand misérable de l’emprisonner de la sorte et de venir ensuite l’accuser à votre cour. Non, je n’aurais pu m’y résoudre à aucun prix, car j’aurais craint d’être emporté par tous les diables ; mais je lui aurais fait bonne chère pendant trois ou quatre jours, et puis je l’aurais laissé aller. Après une pareille trahison, je dis que