Page:Anonyme - Huon de Bordeaux, chanson de geste.djvu/130

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Sommaire.

répandez ainsi mon vin ? — J’en ai bien sujet, répond Naimes. N’y-a-t-il pas de quoi devenir fou à vous voir tellement assoté ? Par le corps Dieu ! à quoi songez-vous ? Êtes-vous venu à Bordeaux pour boire du vin ou du claret, et n’en avez-vous pas assez en France ? Pensez donc, empereur, qu’il s’agit ici de juger un de vos douze pairs. Quand nous aurons mangé outre mesure et bu jusqu’à nous enivrer, comment saurons-nous parler de mort d’homme ? Par le Seigneur qui fut mis en croix ! il n’est céans si haut baron qui ne perde mon amitié s’il continue à boire. — À votre gré, répond l’empereur, et qu’on nous ôte ces nappes. » Puis il ordonne qu’on amène le prisonnier. P. 284-288.

Huon paraît devant Charlemagne avec sa femme et le vieux Jérôme. Tous trois ont les fers aux pieds. Huon accuse Gérard de trahison : « depuis la mort d’Abel, on n’entendit jamais parler d’un tel frère. » Puis il raconte à l’empereur comment il s’est acquitté de son message, et l’aide qu’il a reçue du petit roi Oberon, et son mariage avec Esclarmonde, et son retour, et le guet-apens de Gérard. « On peut voir encore au côté de Jérôme, dit-il, la plaie que lui fit le traître en lui enlevant la barbe et les dents de l’amiral Gaudisse. » À ces mots, Jérôme se lève et montre sa plaie. — Huon achève son récit et propose de combattre contre Gérard et contre Gibouart. — Gérard refuse : il ne peut accepter le combat contre un frère. — « L’entendez-vous, le traître ? dit Naimes, comme il sait bien couvrir sa méchanceté ! » Mais l’empereur n’est pas convaincu. Il veut les quatre dents et la barbe de Gaudisse. — « On me les a volées, répond Huon. — Mais je vous avais défendu, dit l’empereur, de retourner dans votre pays sans m’avoir parlé : avant la nuit vous serez pendu et traîné. »