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iv. — l’auteur et l’œuvre

la compilation indigeste placée sous le nom de l’archevêque Turpin[1].

Après la mort de Ferragu et la prise de Nájera, le Padouan conduit l’armée de Charlemagne devant Pampelune, cité du roi Malgeris, beau-père de Marsile, dont le siège, dure encore quand il écrit son dernier vers. Dans Turpin (ch. 2), Pampelune est la première ville d’Espagne qu’assiège Charlemagne : il reste trois mois devant ses murailles qui s’écroulent miraculeusement, et la ville est conquise du coup. Au début de la troisième expédition, Pampelune, retombée, comme toute l’Espagne, au pouvoir des Sarrasins, est le centre de la résistance d’Agoland (ch. 11 à 14) : après de longues discussions théologiques et morales, et une série de passes d’armes, Agoland est tué par Arnaud de Beaulande, et Pampelune reconquise. Les récits de Turpin n’ont aucun rapport avec ceux de l’Entrée d’Espagne : il n’y a que les noms de Pampelune et de Charlemagne de communs. Enfin, l’expédition de Noble et la prise de cette ville par Roland, d’où doit sortir comme conséquence le départ du héros pour l’Orient, n’ont absolument rien à voir avec Turpin, lequel ne souffle mot de cet épisode dont les racines plongent cependant dans les légendes les plus anciennes de l’épopée française.

  1. A-t-il existé une chanson de geste racontant spécialement le combat de Roland et de Ferragu devant Nájera antérieurement à la Chronique de Turpin ? Gaston Paris est porté à le croire (Hist. poét. de Charlemagne, p. 266), et la forme Fernagu au lieu de Ferragu, qui figure dans différents textes épiques, peut le faire légitimement supposer ; mais rien n’autorise à penser que le Padouan ait connu cette chanson perdue. Le texte italianisé de la Chanson de Roland que nous a conservé le ms. fr. IV de Venise fait allusion, dans un vers interpolé, la prise de Nájera par Roland :

    Pois li conquis la gran çité de Laçare.

    (Édit. Kölbing, v. 2485).