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MADAME GABRIELLE RÉVAL


Madame G. Réval a eu la fortune de connaître la gloire en un jour, ce jour-là où parurent Les Sévriennes (1900).

Il n’y a presque point de livre plus émouvant, ni dont on sente la vérité plus vivante.

C’est par cet air de confidence, et par sa valeur de document qu’il a plu. Il n’y a point non plus de sujet plus intéressant : l’éveil soudain à la vie intellectuelle la plus violente d’une dizaine de cerveaux de jeunes filles. Elles sortent du lycée, et les voici, après l’angoisse de l’examen, dans cette maison de Sèvres, où, en toute liberté, elles vont pendant trois ans nourrir leur esprit neuf du prodigieux trésor de la science, et arracher de leurs jeunes mains passionnées, tous les fruits de l’arbre qui enseigne le bien et le mal. Le travail de ces esprits qui s’orientent, qui s’aventurent, qui filent dans une ligne droite, était peint avec une vraisemblance, et un sens de la vie admirables : le détail des mœurs, la variété des caractères, l’esprit féminin qui subsiste, qui réparait dans les toilettes, dans les petites réceptions, dans l’arrangement des chambres, dans les potins, dans les essais de séduction, dans l’entretien des professeurs, seuls hommes dans cette maison, moqués, adorés et considérables, le frisson indéfinissable enfin de cette jeunesse et printemps, formaient un tableau achevé.

Et des couplets, des descriptions un peu trop faites, comme celle d’une admirable nuit de lune sur la maison et sur le parc, ne paraissaient point seulement des ornements de l’ouvrage, mais les fleurs naturelles d’un esprit, cultivé autant qu’observateur, qui a passé trois ans à Sèvres.

C’est encore avec la suite de l’expérience, qu’elle a faite de l’enseignement, que Mme Reval a écrit les Lycéennes et un Lycée de jeunes filles. Puis cette étude documentaire sur les carrières féminines : L’Avenir de nos Filles.

En 1904 elle publia la Cruche cassée.

En 1906, dans le Ruban de Vénus, elle a décrit un autre peuple intellectuel, les femmes peintres. Là, avec des mœurs différentes, il est curieux de voir qu’elle a retrouvé à peu près les mêmes portraits : l’être obstiné, travailleur et roide, la coquette somptueuse et adroite, cent autres encore, et le type enfin auquel elle revient avec prédilection, l’être fin, tendre et beau, qui dans Les Sévriennes s’appelle Marguerite Triel.