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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

fît grâce. Pendant la route Ulespiègle se tint bien tranquille et ne dit mot, de sorte que chacun s’émerveillait et croyait qu’il était désespéré. Cela dura jusqu’au gibet. Là il prit la parole et invoqua le Conseil tout entier, et pria Messieurs du Conseil, en toute humilité, qu’ils voulussent bien lui accorder une chose qu’il avait à leur demander, ajoutant qu’il ne leur demanderait ni la vie, ni argent, ni biens, ni messe à perpétuité, ni rien qui pût coûter quelque chose ; qu’il ne demanderait qu’une chose sans conséquence, qui ne ferait de tort à personne, et que l’honorable Conseil pouvait lui accorder sans qu’il lui en coûtât un denier. Les conseillers se réunirent et entrèrent en délibération selon l’usage ; ils tombèrent d’accord de lui accorder sa demande, puisqu’il avait dit à l’avance les choses qu’il n’entendait pas demander. Il y avait plusieurs d’entre eux qui étaient impatients de savoir ce qu’il demanderait. Ils lui dirent que ce qu’il désirait aurait lieu, pourvu qu’il ne demandât pas les choses qu’il avait exceptées ; que, s’il acceptait ainsi, ils lui accorderaient sa demande. Ulespiègle dit : « Les articles que j’ai exceptés, je ne les demanderai point ; mais, si vous voulez me tenir la promesse que vous m’avez faite, levez la main. » Ils levèrent la main tous à la fois, et jurèrent de tenir leur promesse. Quand cela fut fait, Ulespiègle dit : « Honnêtes seigneurs de Lübeck, comme vous me l’avez juré, je vous prie, lorsque je serai pendu, que le sommelier vienne tous les matins pendant trois jours de suite, qui vous versera à boire,